Choisir son Église, des frontières et des ponts

Quarante charismatiques qui chantent intensément dans un sous-sol à deux pas de Wall-Street. Quatre cent fidèles, plutôt âgés, dignement recueillis face à d’imposantes orgues et une chorale cristalline. Deux mille jeunes immergés dans une célébration festive qui tient plus du concert rock que de la liturgie classique. Les contrastes sont saisissants. En quelques heures, notre périple nous expose à une vaste palette d’offres chrétiennes. Le choix du Newyorkais est-il défini par la proximité géographique ou le style de la cérémonie ? Lorsqu’on gratte la surface, la réponse s’avère complexe.

La méga-église Hillsong NYC

De fortes identités confessionnelles

De manière spontanée, on imagine que le fidèle va sans doute s’orienter d’abord selon son appartenance confessionnelle : baptiste, catholique, luthérien, pentecôtiste, presbytérien, épiscopalien, etc. Celle-ci joue un rôle majeur, dès l’origine, sur le continent nord-américain. Mais le pratiquant peut aussi brouiller les cartes, chercher à dépasser ces divisions et opter pour une communauté non confessionnelle. Leur développement rapide, dès les années 1970, a bouleversé les codes. Le marketing des méga-églises est passé par là. D’ailleurs, une même confession peut proposer des styles de célébrations très variés. Les différentes Églises presbytériennes que nous avons visitées en témoignent. Ainsi nous faut-il chercher des pistes complémentaires.

Options stratégiques

Sam Wheatley (g) et Jeff White (d)

Nous avons posé la question de leur stratégie à Jeff White et Sam Wheatley, deux pasteurs de Redeemer Downtown. L’histoire de cette Église presbytérienne est riche d’enseignements. Née au début des années 1990, la communauté grandit rapidement, portée par la popularité de son pasteur Tim Keller. Se pose alors la question de la gestion du nombre. Faut-il garder un lieu unique et basculer dans le modèle des méga-églises en cherchant des salles plus imposantes ? Les responsables optent pour une autre approche. Ils décident de constituer une Église multi-sites et installent des succursales dans différents quartiers de la ville. Ils cherchent ainsi à favoriser la proximité géographique tout en conservant leur marque de fabrique.

Aujourd’hui, ils ne se considèrent plus comme une Église de proximité. Ils valorisent une dynamique régionale qui offre une grande autonomie à chaque congrégation. A l’automne 2018, ils implanteront une cinquième communauté dans la perspective de proposer un culte en milieu de semaine. Le facteur géographique est croisé avec l’agenda pour mieux quadriller les habitudes.

Division raciale

Progressivement, Jeff White nous met sur une nouvelle piste lorsqu’il nous raconte son expérience pastorale. Durant dix-sept ans, il a pris soin d’une communauté qu’il a fondée dans le quartier de Harlem. Forte de plus de cent personnes, cette Église aujourd’hui disparue, a fortement valorisé la proximité. Près de 90% des fidèles y venaient à pied. Constituée à 70% d’afro-américains, elle revendiquait sa dimension multiethnique. Une véritable gageure dans le contexte des États-Unis. Ici, la principale frontière n’est pas géographique ou culturelle, elle est raciale.

Jeff et son épouse incarnent cette réalité. Alors qu’ils sont blancs, leurs trois enfants adoptifs sont noirs. Le pasteur de Redeemer Downtown se dit profondément marqué par le théologien et écrivain John M. Perkins, un militant des droits civiques. Dans les années 1970, celui-ci a développé une ecclésiologie basée sur l’idée d’un engagement de proximité marqué par la réconciliation et la redistribution des richesses. Lorsqu’il évoque cette aventure, une ombre passe dans le regard de Jeff White. Il n’hésite pas à la décrire comme la plus belle et la plus difficile de sa vie. Il restera sobre sur les raisons du déclin, nous laissant entendre que les divisions ont eu gain de cause.

A Redeemer Downtown, cette question raciale se pose vis-à-vis de l’importante population d’origine asiatique qui fréquente l’Église. D’où la nomination de John Lin, un américain d’extraction coréenne, au poste de « Senior Pastor » de cette communauté.

Niche ou proximité ?

Faut-il privilégier la proximité géographique et donc l’accessibilité ou faut-il miser sur le voisinage culturel en cherchant à travailler la forme liturgique pour correspondre à un public-cible ? Les témoignages que nous avons recueillis ne donnaient pas une réponse unique. Mais nous avons repéré un point commun chez nos interlocuteurs : ils savent d’où viennent les gens et comment ils arrivent chez eux. Autrement dit, ces responsables ne laissent pas la loi du hasard décider quel type de population est rejoint par quel style de musique, quelle population ethnique, quel genre de liturgie ou quelle distance parcourue.

Et loin de vouloir tout contrôler, ces pasteurs admettent une large part d’inconnu pour laquelle ils expriment leur confiance et, parfois, leurs échecs. Toujours, ils se remettent en question pour mieux accompagner les changements sociaux. C’est peut-être là la grande leçon qui les travaille – et nous, avec eux.

Sous nos latitudes, un tel constat pourrait nous amener à analyser plus finement la circulation – lorsqu’elle existe – des personnes qui fréquentent nos cercles. Il s’agit de visualiser et de créer des lieux de proximité entre la dynamique paroissiale et les groupes sociaux environnants. Ces éléments de stratégie communautaire pourraient alors engendrer de nouvelles manières d’envisager les activités et les événements.

Le labyrinthe spirituel, un outil de pratique spirituelle

Apprécié dans les paroisses à l’occasion de la Semaine sainte, de l’Avent et des périodes de fin d’année, le labyrinthe spirituel est disponible « clé en main », sur un tout nouveau support.

 

Cet outil de pratique spirituelle a traversé plusieurs millénaires et de nombreuses traditions culturelles et religieuses. Il permet à tout un chacun, sans limite d’âge, de condition, de confession et d’origine, de vivre un parcours spirituel. Il se pratique de manière individuelle, dans un environnement idéalement obscurci et sur un fond musical discret.

Le parcours circulaire du labyrinthe est imprimé sur un support en bâche, souple et résistant. Il est fractionné en quatre rouleaux numérotés au dos de 2,30 m/10,10 m qui se déroulent facilement sur toute surface et qui se fixent au moyen d’un adhésif livré avec. Grace à son revêtement, ce labyrinthe peut être installé à l’intérieur comme à l’extérieur durant plusieurs jours.

Le matériel du labyrinthe comprend également 400 photophores et bougies et une croix démontable en bois (une étoile est également proposée). Sont proposées également des cartes de prières, de versets et de paroles à méditer durant le parcours, en trois langues (FR, EN, DE) ainsi qu’une notice explicative pour la préparation et le montage du labyrinthe.

Pour une installation de l’activité à l’extérieur, des bougies LED sont également mises à disposition sur demande.

Location

Participation de CHF 100.–, qui comprend une semaine de location et la mise à disposition de tout le matériel nécessaire à la réalisation de cette activité.
Pour une durée de location plus grande, le coût supplémentaire hebdomadaire s’élève à CHF 70.- pour la 2e semaine et CHF 35.- dès la 3e semaine.

A télécharger


Information importante (novembre 2022) :

Malheureusement, suite à une réorganisation interne, nous ne disposons pour le moment plus des forces de travail pour gérer la location du labyrinthe. Ce message sera supprimé lorsqu’une solution sera trouvée.


Pour la réservation, veuillez télécharger et remplir le formulaire ci-dessus, puis l’adresser via le lien ci-après.

Nous vous confirmerons la réservation définitive par courriel.






    L’empreinte de Vito Aiuto

    Certaines personnes vous marquent d’une empreinte particulière. C’est ce qui nous est arrivé en rencontrant le pasteur Vito Aiuto. Il nous avait donné rendez-vous un restaurant ukrainien dans le quartier d’East Village, au-delà du pont de Williamsburgh que nous traversions quotidiennement pour rejoindre Manhattan depuis Brooklyn. D’emblée, Vito nous dit que ce lieu compte pour lui. Du haut de ses vingt années passées à New York, il nous avoue qu’il y revient parfois. Nous nous sommes surpris à imaginer l’épaisseur de sa vie new-yorkaise, saturée de ses souvenirs et de ses anecdotes que nous ne saurons jamais.

    Un musicien parmi les hipsters

    Enfin, Vito est là, devant nous, d’une jeunesse inaltérable, élégant, intimidant aussi. Avec une casquette de baseball de Détroit (sa région d’origine) bien ajustée sur sa tête, il veut d’abord nous connaître, alors nous devinons que cet entretien l’amuse, et il connaît un peu la Suisse… depuis son voyage à Paris.

    Vito est une célébrité. Le New York Times a fait un portrait de ce «pasteur pour hipsters». Il est aussi musicien: sur Youtube, certaines chansons de son groupe, The Welcome Wagon, comptabilisent 150 000 vues, ce n’est pas peu dire pour du folk urbain à forte consonance chrétienne. Vito est un pasteur peu commun de par ses capacités de composition. Il renouvelle et adapte les chants aussi pour son Église. Cette pratique est centrale dans le succès de ses cultes.

    Le don de s’effacer

    Il est difficile de s’effacer lorsque vous avez une personnalité aussi charismatique. Mais Vito s’y efforce sans cesse. Au sein de sa communauté, il ne se considère pas comme le champion de la foi. Il ne souhaite pas être celui qui croit à la place des autres – encore moins «mieux» que les autres. Au contraire, il cherche à encourager la foi d’autrui en se mettant à leur portée, et n’a pas peur de douter avec eux. Sa vocation lui reste étrangère et énigmatique: ce qui constitue la nature profonde de son engagement pastoral – et de sa foi. Jour après jour, il s’étonne d’être là, devant sa communauté, à prêcher.

    Derrière l’assurance de sa posture pastorale, une immense humilité se dégage à mesure que nous discutons avec lui. Elle est d’autant plus exprimée que Vito ne tire aucun avantage personnel du succès de l’église qu’il a implanté dans Williamsburgh. Il demeure conscient de la fragilité de cette communauté composée de personnes très jeunes, principalement entre 20 et 35 ans. Contre toute attente, il aspire à avoir plus de personnes âgées, pour des questions d’expérience et de stabilité. Avec les jeunes, il y a beaucoup de mouvement et la communauté doit tout le temps s’adapter à ces vagues d’arrivées et de départs.

    Une théologie simple et généreuse

    Un détail touchant qui caractérise son rapport à la foi: au moment où nous nous apprêtons à le filmer, nous lui demandons de tester son micro. Il se met alors à déclamer le Psaume 1, comme s’il s’agissait d’un long slam. Chez lui, la Bible et la théologie se font poésie, sans ostentation, avec une profonde légèreté.

    Vito Aiuto n’est pas comme les autres, mais nous aimerions tous être comme lui: sincère et soucieux de promouvoir la parole et les promesses de l’Evangile, et plus que tout, de rappeler la bonté de Dieu pour ses enfants. Cette pointe théologique, simple et généreuse, glisse sur nous comme un baume. Néanmoins, nous demeurons conscients que cette vérité est le résultat d’un long travail de foi. Voilà, le chemin spirituel de Vito Aiuto. Et nous aimerions encore le suivre, et le quitter, sans pouvoir l’oublier.

    Une liturgie pour entrer dans l’Histoire

    14e rue, dimanche, 17 heures: ils sont plus de 400 jeunes adultes à célébrer dans le Centennial Memorial Temple de l’Armée du Salut. La plupart, des étudiants blancs ou asiatiques issus d’universités prestigieuses. C’est le second culte de la journée, celui du soir, dit «contemporain», que tient l’Église presbytérienne Redeemer de Dowtown. Sur l’estrade, un quartet country (violon, mandoline, guitare, basse) accompagne avec une virtuosité nonchalante deux chanteuses à la voix cristalline. Les hymnes traditionnels prennent une densité incroyable: de quoi faire sortir Johnny Cash de la tombe pour entonner le refrain.
    Mais ce n’est pas un spectacle. L’assemblée donne elle aussi de la voix. Surtout, la musique est mise au service d’une liturgie tout ce qu’il y a de plus classique. Et ces jeunes s’y sentent à l’aise. Ils y participent avec une ferveur sensible, bien que contenue, presbytérienne. Et c’est là l’essentiel.

    Une génération prête pour l’Église

    Sam Wheatly

    En tant qu’Européens, nous avons tendance à associer les célébrations liturgiques aux cultes pour le troisième âge. Nous posons la question à Sam Wheatly, coordinateur de la pastorale de Redeemer Downtown: comment expliquer le succès d’une telle formule auprès d’un public jeune, universitaire ou en début de carrière professionnelle?
    La réponse du pasteur décape: «en regardant les ministères novateurs, nous avons constaté que les Baptistes du Sud avaient récemment abandonné les aumôneries sur les campus universitaires au profit de l’implantation d’Églises sur ces mêmes campus. D’après eux, la génération précédente de jeunes, qui avait grandi à l’Église, voulait une expérience religieuse plus cool; mais la génération actuelle, moins marquée par le christianisme, ne veut plus de cela. Pourquoi donner à ces jeunes une version dépouillée de l’Église? Donnons-leur directement l’Église. Les gens ont besoin d’enseignement, de liturgie, de s’engager en tant que membres de ce corps qu’est l’Église.»

    Une liturgie, différentes déclinaisons

    Vito Aiuto

    Rien de très original dans les rubriques de cette liturgie. On y retrouve les cases habituelles: confession des péchés, échange de la paix, prières d’intercession, etc. Cette organisation du culte se retrouve dans la grande famille protestante classique, le mainstream, qu’il s’agisse des épiscopaliens, des luthériens ou des méthodistes.
    Il y a cependant une inflexion presbytérienne à cette liturgie. Les textes choisis sont souvent puisés dans la tradition réformée (par exemple, un extrait du Catéchisme de Heidelberg placé en guise de confession de foi juste après la prédication). À ce fonds théologique, s’ajoute une manière de faire qui se retrouve partout, du milieu le plus huppé au contexte le plus populaire: le caractère classique de la liturgie n’empêche pas les ministres de célébrer avec décontraction. Rien de poussiéreux ou de poussif. On ressent au contraire une liberté permettant d’alterner répons, prières écrites et spontanées entre l’officiant et l’assemblée.
    Cette forme standardisée se décline toutefois – et c’est là son génie – de multiples façons. Ces variations sont ajustées au contexte de la communauté. Elles peuvent être culturelles: la très cossue Fifth Avenue Presbyterian Church célèbre en grande pompe, avec orgue et chœur; la modeste Williamsburg Resurrection, à Brooklyn, propose une louange folk urbaine; alors que Redeemer Dowtown prend, pour son culte du soir, une tournure country. À noter que ces trois Églises, chacune avec des ressources financières très différentes, proposent des prestations musicales de qualité professionnelle.
    Mais il y a aussi les différences théologiques: Redeemer (qui refuse le pastorat féminin) et Fifth Avenue (qui compte deux femmes dans son équipe pastorale) incarnent des pôles opposés, conservateur et libéral. Quant à Resurrection, elle occupe une position médiane entre les deux. Ces différences n’ont pas d’incidence sur le déroulement de la liturgie.

    Le bulletin, une spiritualité à emporter

    Un objet matérialise cette pratique de la liturgie. Il s’agit du bulletin, ce fascicule que vous tend la personne préposée à l’accueil au moment où vous pénétrez dans la chapelle. Ce livret contient le déroulement du culte: les parties, les chants, les prières écrites et les répons, les lectures bibliques. Toutes les Églises presbytériennes que nous avons visitées proposaient leur version réalisée spécialement pour le culte auquel nous assistions. Le pasteur Vito Aiuto (Resurrection) nous a confié qu’il passait une à deux heures par semaine à préparer ce livret pour le dimanche suivant.
    Le bulletin est un objet à la fois communautaire et personnel. On vous le tend en arrivant, vous l’utilisez pendant la célébration et vous l’emportez en repartant. Vous avez ainsi loisir de revenir, tout au long de la semaine, sur les lectures bibliques, les chants ou les prières du dimanche précédent. Vous repartez avec du grain à moudre, libre de poursuivre, chez vous, la méditation.
    Surtout, à la longue, l’usage du bulletin produit des fruits dans l’assemblée. Les catégories de la liturgie deviennent une seconde nature, une habitude constructive, une vertu. Ces catégories explorent le rapport à Dieu, au monde et à autrui, à soi. Le pasteur Jeff White (Redeemer Dowtown) nous partageait à quel point cette forme de célébration constitue une «discipline spirituelle»: elle ancre la spiritualité, pas seulement dans la tête et chez l’individu, mais dans le corps et la communauté.

    Célébrer une histoire qui nous transcende

    Jeff White

    Notre étonnement tenait à la façon dont une liturgie si classique résonnait chez un public jeune et éduqué. En discutant avec les pasteurs Vito Aiuto ou Jeff White, nous avons été frappés par leur souci d’intégrer dans leurs liturgies des éléments provenant de la tradition réformée, mais aussi de longue histoire du christianisme, remontant jusqu’aux Pères de l’Église.
    Rien d’original, cette liturgie n’est pas un espace où les ministres mettent en scène leur singularité. Le projet est à la fois plus modeste et plus ambitieux: ces pasteurs proposent à leurs paroissiens de célébrer, de façon intime et communautaire, l’histoire de l’Église, de s’en imprégner, afin d’en écrire aujourd’hui, dans leurs vies quotidiennes, de nouvelles pages. La célébration devient alors une façon, pour ces jeunes, de participer à une histoire qui les transcende.

    Église du passé composé, Église du futur antérieur

    L’harmonie entre le temple et les fidèles frise la caricature. Le bâtiment, sur la célèbre 5e Avenue, se démarque des buildings environnants. A l’intérieur, un orgue majestueux surplombe une galerie qui abrite la chorale. Des boiseries sombres et des tapis feutrés installent une atmosphère digne et confortable. Les bancs en amphithéâtre mettent en valeur la centralité de la parole théologique. La Fifth Avenue Presbyterian Church offre un accueil efficace et souriant.

    Un coup d’œil à l’assistance révèle une classe sociale élevée. De même, les têtes blanches sont surreprésentées : elles étaient absentes des autres cultes que nous avons fréquentés.

    Beaucoup de monde, près de 400 personnes présentes, pourtant les échanges sont chaleureux. L’intensité des salutations laisse imaginer que c’est de longue date. Les conversations vont bon train et la chorale commence à chanter.

    Dieu dans nos histoires

    L’assemblée glisse en douceur dans la célébration. L’ensemble allie un ton décontracté et une tenue liturgique impeccable. L’excellence de la musique – une chorale classique de haut vol soutenue par un organiste virtuose –, les références de la prédication et une solide équipe pastorale mènent la danse. L’enthousiasme de l’assistance fort nombreuse s’exprime lors des chants et des applaudissements, notamment quand l’un des pasteurs annonce qu’il a reçu une bourse pour développer un programme intergénérationnel.

    Ce jour-là, Scott Black Johnston, le pasteur principal, fête ses dix ans de ministère dans la communauté. Il renouvelles ses vœux avec ferveur entouré par trois collègues et autant de laïcs. Sa prédication annonce une série de messages autour des matriarches et des patriarches du livre de la Genèse. Il évoque son arbre généalogique qui comprend l’un des illustres fondateurs de la communauté, c’était au début du 20e siècle. Sa parole allie humour et intelligence. Les exemples tirés de son vécu sont mis au service d’une idée forte : les histoires de famille sont le lieu où Dieu noue des alliances.

    Un Rotary Club

    La communauté apparaît comme un groupe solide et établi. Rien ne vient troubler ce qui s’apparente à une fête de famille célébrée dans un club privé. Ce n’est pas faute de chercher de nouveaux membres, d’ailleurs un ministère spécialisé dans le domaine a été créé en juin dernier. L’intégration des arrivants éventuels semble être un processus rôdé. Au verso du livret du culte, le nouveau venu trouvera un formulaire pour prendre contact. En début de célébration, ces personnes sont invitées à s’identifier en levant la main. Quant aux membres réguliers, ils jouent leur part en accueillant ces visiteurs. Ceux-ci ont aussi, comme presque partout, accès aux nombreux groupes de partage et de prière qui gravitent autour de la paroisse. Une formation sur les bases de la foi leur permet même d’en comprendre rapidement les arcanes.

    Un lent déclin ?

    Pourtant quelque chose semble grippé. Le groupe de jeunes qui bénéficie d’un programme adapté durant le service est d’une maigreur effarante. Peu de visiteurs de passage se signalent alors que l’assemblée est bien étoffée. La pyramide des âges est en fort décalage avec cette société new-yorkaise qui affiche un âge moyen de 35 ans.

    Pourtant, aucune fausse note n’indique que la communauté serait en proie à une crise. L’atmosphère est sereine et positive. Mais la paroisse peine visiblement à toucher les jeunes et les classes populaires. D’autres offres religieuses concurrentes s’en chargent. On a le sentiment d’être en présence d’une congrégation qui s’éteint tranquillement, fidèle à ses racines, à ses standards et à ses engagements sociaux. Elle est encore forte de son prestige, de son histoire, de ses murs, mais elle semble déconnectée de la vie trépidante qui agite la métropole. Aujourd’hui, elle joue un rôle indéniable dans le concert des Églises que nous avons croisé sur notre route.

    Fausse sécurité

    Une Église qui a des moyens donc, sûre de sa culture élitiste et de sa place dans la société. Pourtant, le décalage entre cette assemblée vieillissante et la population new-yorkaise, jeune pour l’essentiel, interroge. Les changements culturels ne semblent pas troubler les habitudes de ce cercle protégé qui cultive un certain entre-soi. Pourtant, le fossé continue de s’accroître en regard de la société, et le dynamisme risque de s’essouffler. Sous les apparences de sécurité, sans s’en rendre compte, Fifth Avenue Presbyterian Church prend  la voie de ces paroisses fossilisées qui consacrent l’essentiel de leur énergie à la célébration de leur mémoire.

     

    A l’Église comme à la maison

    L’Église Resurrection Church à Williamsburgh (Brooklyn, NY) a été implantée dans le quartier de Brooklyn depuis environ huit ans sous l’impulsion de l’Eglise Redeemer avec la responsabilité du pasteur Vito Aiuto. Cette communauté compte aujourd’hui près de 300 personnes bien impliquées dans les différents groupes de lecture et les activités. Elle est désormais indépendante et a pris son envol soutenue par la personnalité charismatique de son pasteur. Composées de personnes entre 25 et 35 ans et de jeunes parents, avec une vraie mixité sociale, cette communauté est comme une île de douceur au milieu d’un environnement urbain tentaculaire.

    Une église où vous êtes déjà chez vous

    Vous arrivez dans un quartier très calme avec quelques bâtiments délabrés. Un quartier plutôt pauvre à la pointe nord de Brooklyn, investi par une population jeune, composée d’étudiants et d’artistes. La spéculation immobilière, avec sa cohorte de bobos, n’est pas encore passée par là.
    A l’entrée, beaucoup de personnes jeunes et avenantes, très investies. Elles vous donnent le sentiment que vous êtes d’emblée accepté. Un prénom suffit. On vous propose du café. Et vous vous sentez chez vous, dans un lieu chaleureux.
    L’église est grande, belle, décrépie aussi. Le plafond ne retient plus la pluie. En témoignent les bacs juchés un peu partout dans les étages des balcons. Ça ne dérange pas, au contraire. La vétusté du bâtiment lui donne un style plus fort, un peu alternatif.
    L’église a gardé son identité initiale luthérienne : le décor, clinquant, fleure le catholicisme. Au coin, un orchestre de musique folk urbaine joue. L’ambiance est posée. C’est une réunion entre amis. Une intimité particulière se dégage, portée par l’endroit et l’attente du culte.

    Un culte classique et relaxe

    La liturgie traditionnelle réformée est respectée. Quelques particularités la rendent plus intense. La confession des péchés se fait à genou : le moment, bref et dense, interpelle. Puis, après avoir reçu la grâce, à la suite de la prière, les participants se serrent la main pour se donner la paix du Christ. Ce geste est chaleureux. Certains paroissiens traversent la chapelle pour se donner l’accolade. Cet instant de partage dure. À nouveau, inattendu. La musique reprend doucement pour indiquer que la cérémonie se poursuit.
    Les choses se suivent, décontractées, jusqu’à la prédication. Le thème du jour : l’espérance. C’est pasteur Vito Aiuto qui prêche. Une personnalité profilée, musicien (folk urbain), dont le sérieux théologique surprend. Par moments, il interrompt sa prédication pour inviter la communauté à relire certains passages. Chaque personne est munie d’une Bible. Le culte se mue alors en un grand groupe de partage et de réflexion. La communauté étudie avec concentration. On sent une habitude profondément ancrée. Tous, petits et grands, participent à l’interprétation. C’est une construction collective.
    La fin du culte est très joyeuse et communique un sentiment de libération. On bascule à nouveau dans la réunion décontractée entre amis. Les paroissiens restent là, pas pressés. Le pasteur est loin de se trouver au centre de l’attention. Au contraire, chacun semble avoir une place. Le regard demeure attentif aux autres. Chaque contact étant une occasion d’approfondir un lien et de faire vivre la communauté. Et vous vous sentez déjà chez vous.

    Une source d’inspiration

    Après cette expérience de culte, nous avons retenus quelques éléments qui nous ont plu et qui, à notre sens, sont une source d’inspiration pour notre Eglise en Suisse romande. Nous dirons tout d’abord que chaque personne est investie autant que le pasteur dans l’attention portée à autrui. Bien que le pasteur soit ici une figure très charismatique pour sa communauté, nous sentions bien qu’il n’en était pas le centre. Il y avait là un immense travail de mise en lien de la part du pasteur. Après la prédication, il s’est fondu dans l’ensemble des groupes et des conversations, personne n’a convergé vers lui, au contraire.

    L’autre aspect se manifeste dans la capacité à réinvestir la liturgie classique à l’aide de musique contemporaine folk écrite et composée par des musiciens de la paroisse. Les paroles étaient faciles à assimiler, et sans tomber dans le kitsch ou le simplisme. De plus, nous percevions rapidement l’immense travail fait en amont au niveau des groupes de lecture. Chaque paroissien avait sa Bible avec lui et était impliqué dans l’interprétation des textes avec le pasteur, en direct. Du coup, il y avait cet aller-retour entre des moment plus calmes et légers et des moments de lecture communautaires, de méditation, et des instants de joie… Le culte, avec son rythme cadencé et varié, a passé très vite… tout en restant simple, classique… A notre portée.

    Au service de la créativité liturgique

    On le sent un peu amusé lorsqu’il évoque ses racines, au pays de la « Bible belt » la ceinture conservatrice des Etats-Unis. Ses parents, des immigrés de Taiwan de tradition bouddhiste, se sont installés à Jackson, Mississipi. Au cœur du territoire des puissantes Églises baptistes du sud, Gerald Liu découvre la foi chrétienne au détour d’une soirée musicale et d’une invitation à participer à un culte. Impressionné par la menace de l’enfer, il se tourne vers la foi à l’instar de ses deux grands frères et se met à dévorer la Bible en catimini. En famille on considère qu’il s’assimile à la culture du pays.

    A douze ans, un voisin méthodiste l’emmène dans sa communauté. Il y restera. C’est dans cette tradition qu’il est ordonné ministre en 2005. A l’entrée à l’Université, il se verrait bien dans le business ou la musique. Sa passion pour la guitare l’emporte et il obtient un diplôme remarqué. Un ami le convainc alors de poursuivre en théologie. Il envoie sa candidature dans différentes universités. A sa grande surprise, il est reçu à l’Université Emory à Atlanta (Géorgie) avec une bourse prestigieuse. Une expérience d’échange universitaire en Allemagne, puis une affectation pastorale en Angleterre, confirment son goût pour la pratique. Sa thèse achevée en 2013, il s’oriente vers l’enseignement et occupe différents postes au Tennessee, dans le Kentucky puis dans le New Jersey. Aujourd’hui, il enseigne la prédication et la liturgie au Séminaire théologique de l’Université de Princeton.

    Quelles sont les Église de New York que vous considérez comme créatives ?

    Beaucoup d’Églises effectuent des expériences. Je pense à un collectif intitulé Not so churchy (pas si Église que ça) dont les formes sont très démocratiques. La méga-église Hillsong fait aussi des choses intéressantes et se préoccupe de questions sociales comme le racisme ou l’homosexualité. Ce n’est pas forcément très novateur mais il faut souligner le succès numérique et la créativité musicale. Cela dit, je pense qu’il y a peu de projets vraiment expérimentaux. Je verrais d’un bon œil des formes qui s’inspireraient de Taizé ou du monastère d’Iona (Ecosse). La culture populaire américaine a eu, à mon sens, une influence planétaire très forte qui nous a éloigné d’autres découvertes culturelles. L’enjeu que je vois est celui d’un mélange culturel capable de combattre l’un des plus grands péchés à l’échelon planétaire qui est celui du racisme. Notre pays a été conquis par un génocide et ses infrastructures ont été forgées par l’esclavage. Les Églises devraient être à la pointe de la réconciliation alors que leurs cultes restent des lieux de profonde ségrégation.

    Vous estimez que les protestants ont un problème avec les cultures populaires en vogue dans les milieux plus évangéliques. Que voulez-vous dire par là ?

    Je suis méthodiste et sans vouloir trop romancer notre fondateur, John Welsey, j’aimerais souligner qu’il a étudié à Oxford. Cette éducation d’élite ne l’a pas empêché de prêcher dans les campagnes, les cimetières et les pubs. Sa motivation à ramener les foules dans les Églises n’a pas connu de succès de son vivant, ni en Angleterre, ni aux États-Unis, mais son mouvement a donné naissance à une nouvelle forme d’Église. Je pense aussi à Jésus lui-même. Du haut de sa divinité, il s’abaisse à laver les pieds de ses disciples. Là encore, c’est en contraste avec les codes culturels de son époque. Notre protestantisme libéral, parfois élitiste, doit s’interroger sur la manière de rejoindre les masses. Les évangéliques utilisent la musique pour le faire. Je ne dis pas qu’il faut les imiter, mais que nous devrions mettre un accent moins grand sur l’élitisme de nos services religieux au profit d’une meilleure accessibilité.

    Comment envisagez-vous la question du succès numérique des Églises ?

    Une partie de notre idéalisation des Églises de petite taille traduit de l’insécurité. Une sorte de déni de ce que nous sommes. Beaucoup de protestants sont en décroissance. Ma propre tradition méthodiste est aujourd’hui plus petite qu’à ses débuts sur le sol américain. Nous nous réfugions dans un discours anti-croissance pour éviter de reconnaitre nos échecs. C’est une manière romantique d’accepter notre diminution. Le discours consiste à décrier les évangéliques à cause de leurs succès, et à identifier ces succès à des simplifications ou à des dérives théologiques et liturgiques. C’est peut-être correct, mais peut-être que ce ne l’est pas. Je ne suis pas opposé aux petites communautés, mais ce je lis dans les textes bibliques me conduit plutôt à l’expansion. Abraham est appelé père d’une multitude. Le message de Jésus s’adresse d’abord à la « maison d’Israël » pour ensuite s’étendre aux « gentils ». Les langues de la Pentecôte me semblent aussi rejoindre cette dimension fondamentale d’élargissement.

    Les Églises qui se développement reposent souvent sur le charisme d’un petit nombre de personnes. Qu’en dites-vous ?

    Il y a de bonnes raisons d’être prudent avec les charismes personnels. Les dérives autoritaires sont faciles, on l’a vu dans l’histoire récente, mais chaque mouvement qui se développe est porté par la personnalité de ses meneurs. Le charisme c’est avant tout un don, c’est le sens de ce mot. A mon sens il ne faut pas voir que le côté négatif. Je suis convaincu que nous avons besoin de leaders aujourd’hui. Et pour moi le défi est plutôt celui de donner de bonnes formations à ces responsables. Si je me réfère aux figures de Jésus ou de Paul, je ne peux pas considérer qu’avoir de fortes personnalités soit une mauvaise chose.

    En tant que professeur de théologie, qu’enseignez-vous à vos étudiants ?

    Je pense à un cours avant-gardiste et expérimental que je donne autour de la liturgie. Je me réfère à une étude d’un sociologue de la religion, Mark Chaves, qui met en lumière que les Églises font globalement trois choses : elles transmettent la foi, elles célèbrent et elles produisent de l’art. Il s’agit d’éviter toute distinction entre arts majeurs et mineurs : tous les aspects d’un service religieux sont de nature artistique. Avec cette idée, nous nous intéressons aux artistes avant-gardistes et cherchons à comprendre comment leur travail peut nous amener des innovations liturgiques. Je pense à l’une de mes étudiantes qui écrit de la poésie. Elle a organisé une sorte de performance de prédication de nature musicale et poétique dans un bar de Brooklyn. Elle m’a raconté qu’il y avait 100 à 150 personnes, – c’est bien plus que dans un service religieux ordinaire aux États-Unis. Je souhaite que mes étudiants connaissent les liturgies classiques et les traditions, mais j’espère qu’ils seront assez courageux pour chercher de nouvelles formes. La nouveauté n’est pas une fin en soi, mais un moyen de rejoindre d’autre personnes.

    Une anecdote personnelle, en lien avec la créativité que vous appelez de vos vœux ?

    Je pense à une expérience que nous avons fait dans un bar en Angleterre. C’était il y a quelques années. Noël tombait sur un dimanche. J’avais congé ce jour-là et je me suis arrangé avec un tenancier de pub pour organiser une veillée de Noël dans son établissement. Je me souviens de ces 300 personnes qui ont partagé la Cène à 23h45. La musique et les écrans de télévisions ont soudain laissé la place au silence. On m’a donné un micro pour quelques paroles d’explication. Je portais un col romain ce qui m’identifiait comme ministre de la Parole. J’ai balbutié quelques paroles dans la foule. Une personne s’est avancée, puis une deuxième, et finalement le bar tout entier a pris la communion distribuée par les serveurs. Je crois que nous avons vécu là une intervention divine. Je ne suis pas certain qu’il faille en faire une tradition, mais je suis convaincu qu’il nous faut faire diminuer nos inhibitions. Cela afin de permettre aux personnes de comprendre pourquoi le fait de fréquenter une Église est une bonne chose, pourquoi l’amour de Dieu et des autres amène une vie meilleure. Pour ce faire, nous devons quitter notre zone de confort et faire des choses nouvelles.

    Le Midwest ou Wall Street?

    «Allez voir, ils font le plein un vendredi soir à New York. Ce n’est pas banal!» Intrigués par la recommandation de Gerald Liu, professeur de théologie à Princeton, nous mettons le cap sur le quartier de Wall Street. Une petite église charismatique se réunit dans le sous-sol d’un immeuble de Maden Lane, à deux pas de la bourse. Il s’agit de la Life Center Church NYC. Un verset, au-dessus de l’escalier qui conduit à la chapelle, accueille le visiteur: «Je connais les projets que j’ai formés sur vous, dit l’Éternel, projets de paix et non de malheur, afin de vous donner un avenir et de l’espérance» (Jérémie 29,11).

    Vendredi, nous arrivons peu avant 20 heures pour la soirée de louange hebdomadaire. Au programme, deux heures ininterrompues de chant, lectures bibliques improvisées, prières et paroles d’exhortation «prophétiques». La salle compte une trentaine de personnes à notre arrivée. Pour la majorité, ce sont des jeunes dans la vingtaine avec un profil d’étudiants. Il y a aussi quelques familles avec des enfants en bas âge. Après une heure de célébration, on dénombre un peu plus de soixante participants. L’assemblée, très homogène, est composée de blancs, à l’exception de cinq personnes afro-américaines ou asiatiques.

    À l’origine : réveiller l’Amérique chrétienne

    Le site Internet de Life Center Church NYC raconte les débuts de cette Église. Cette initiative est une réponse à un rassemblement de jeûne, de louange et de prière qui se tient à New York en 2002. Ce rassemblement est impulsé par une organisation charismatique, The Call, dont le cheval de bataille est la décadence de la société américaine et le «réveil» spirituel de l’Amérique. Deux maux seraient à combattre par la prière et l’activisme: l’avortement et l’homosexualité. Le mouvement est étroitement lié à la Droite chrétienne. Son fondateur, Lou Engle, est l’initiateur de «Maisons de prières pour la justice» [Justice Houses of Prayer, ou JHOP]. Ces maisons sont des relais locaux de la mobilisation politico-morale.

    Le rassemblement de The Call à New York avait constitué un réseau de personnes. Dès 2006, ce réseau se réunit deux fois par mois dans une petite salle de conférence, formant ainsi une «maison de prière pour la justice». Quelques années plus tard, la cellule newyorkaise prend le nom de «Life Center Church NYC» et s’établit dans le quartier financier. Elle vise à convertir les traders de Wall Street. Cet objectif est lié à une certaine théologie charismatique, dite de la «domination»: il s’agirait d’infiltrer différentes sphères de la société (le marché, le gouvernement, etc.) pour imposer l’idéal d’une nation chrétienne.

    Traders ou étudiants?

    Mais, comme en témoigne notre observation, il y a un écart entre le public visé (les financiers) et les participants réels (des étudiants). Pour comprendre ce décalage, il vaut la peine de décrire la spiritualité proposée.

    Ces soirées de louange, tout comme les cultes, mettent l’accent sur une relation d’amour intense entre Dieu et le fidèle. Cela apparaît dans les chants, les «prophéties » et les manifestations corporelles des participants (danses spontanées, prostrations, «parler en langues»). L’amour se conjugue à une fascination pour la toute-puissance de Dieu – que les pasteurs n’hésitent pas à tirer du côté de l’emprise sur la société. Mais, pour les participants, l’essentiel n’est pas là: Dieu est à la fois le confident intime et le roi de l’univers.

    En réalité, Life Center Church NYC ne propose rien de spécifiquement newyorkais, mis à part la focalisation sur Wall Street. Ce charismatisme se retrouve aussi bien à la Bethel Church de Redding en Californie qu’à l’International House of Prayer de Kansas City dans le Missouri.

    Dès lors, qui adhère à cette spiritualité? Le profil des participants nous met sur la piste: il s’agit ici de jeunes qui ont grandi dans un milieu évangélique et qui ne sont pas originaires de New York. Arrivés de zones rurales où ce charismatisme à cours, ils ont gagné la grande métropole sur la côte est pour poursuivre leurs carrières. L’Église qu’ils ont trouvé à Wall Street leur permet de garder une piété familière, de se sentir sécurisés, dans une ville très compétitive.

    Expansion ou repli?

    Cette réflexion en appelle une autre. Ces jeunes ne représentent en réalité qu’une fraction de la jeunesse charismatique qui rejoint la ville. On pourrait alors s’attendre à ce que l’assemblée soit bien plus nombreuse, comme c’est le cas pour des cultes plus classiques qui rassemblent près de 300 étudiants de leur âge, par exemple à Redeemer Downtown, une Église presbytérienne de tendance conservatrice et liturgique. Dès lors, où sont les autres jeunes charismatiques montés à New York?

    Cette question permet de revenir sur la recommandation du Professeur Liu, au moment où il nous invitait à visiter Life Center Church NYC. On peut s’interroger pour savoir si cette affluence du vendredi soir témoigne d’un phénomène qui marche, d’une croissance, ou d’un modèle en bout de course, un repli sur soi. Et si cette implantation ne répondait qu’à la nostalgie du Midwest perdu, et non aux réalités exigeantes auxquelles sont confrontés les traders de Wall Street?

    Que retenir? Tout d’abord, l’écart entre le public visé et les gens qui viennent réellement doit être travaillé. Oui, la taille du groupe est un critère important lorsqu’on lance une nouvelle activité. Mais, plus décisif encore, il s’agit d’identifier si l’on est en train de reproduire une forme de communauté qui s’épuise ou si, au contraire, on inaugure des manières inédites de vivre ensemble l’Église.

    Présentation de la démarche

    Question de format

    Aux débuts de la micro-informatique, les supports de données, les fameuses disquettes, faisaient régulièrement l’objet d’un formatage. On effaçait les données pour redonner une jeunesse à l’objet. Cette opération lui permettait d’accueillir de nouvelles informations.

    Cette analogie nous invite à revisiter la pratique chrétienne. Non pas pour contester le passé, ni pour nous mouler sans distance critique dans « la culture contemporaine ». Plutôt avec l’idée du discernement et de la remise en question. Pour ce faire, nous sommes allés à New York chercher l’inspiration au contact d’Églises proches de la tradition réformée.

    New York

    La plus grande, et peut-être la plus européenne, des villes américaines est un laboratoire religieux intriguant. Sa diversité met en proximité une grande variété de communautés culturelles et linguistiques. Le nombre important de pratiquants – un tiers de la population –conduit à l’émergence de milliers de communautés. Bien entendu, New York est aussi traversée par la sécularisation qui touche le continent américain. Il est donc important d’observer les élans missionnaires plus ou moins assumés de ces Églises.

    Une masse de pratiquants

    Le christianisme est la foi de près de 60% des 8,5 millions d’habitants qui vivent au cœur de la métropole. Par ailleurs, un tiers des Newyorkais sont des pratiquants réguliers. Parmi les chrétiens, ce sont 1,7 millions de fidèles qui se rassemblent chaque semaine dans l’un des 6’000 lieux de culte recensés. En moyenne, cela fait 280 personnes par endroit.

    Une variété d’Églises

    À majorité catholique, la mégapole abrite aussi une myriade de chapelles protestantes. Sans surprise, les courants proches de nos Églises réformées y sont très minoritaires. Pêle-mêle, on trouve des presbytériens héritiers lointains de réformés écossais, des épiscopaliens issus de l’anglicanisme, des réformés descendants de l’immigration calviniste hollandaise, des luthériens et nombre de dénominations dont les noms sont inconnus sous nos latitudes.

    Difficile donc d’estimer le poids des réformés. Surtout s’il s’agit d’essayer de les distinguer des évangéliques. Les courants pullulent au pays de la libre entreprise et les sensibilités théologiques se distribuent selon l’éventail qui va des plus conservateurs aux plus libéraux. De plus, l’importance numérique des courants conservateurs ne doit pas masquer le fait que les Newyorkais votent plutôt démocrate, qu’ils sont tolérants vis-à-vis de l’homosexualité et de l’avortement, ce qui ne correspond pas du tout aux standards de ces dénominations.

    Notre recherche

    Nous avons sélectionné des communautés religieuses dont la sensibilité est plutôt proche de la tradition réformée et dont les formes sont diverses. La dimension missionnaire de ces Églises et les éléments d’innovation sont au centre de notre focale. Par l’observation et la rencontre, nous essayons de comprendre les choses de l’intérieur. La question qui nous taraude : comment les Églises réformées se vivent en milieu urbain et comment elles travaillent leurs spécificités dans le concert des autres spiritualités.

    Des articles reformatés

    Sous le titre « Églises reformatées », nous voulons publier ici le fruit de nos découvertes et de nos réflexions. Nous faisons le pari que ces documents constitueront des éléments stimulants pour réfléchir à de nouveaux formats permettant de valoriser les trésors de la foi qui s’abritent en nos traditions.

    L’équipe de cette recherche est constituée de Mirja Nicollier, Dimitri Andronicos, Philippe Gonzalez et Jean-Christophe Emery.

    Jeu Evang’îles, nouvelle édition.

    Comment parler de sa foi ? Comment mettre des mots sur ses expériences spirituelles ou ses convictions ? Souvent considérées comme une réalité très intime, les questions religieuses sont fréquemment mises de côté. Par le biais d’une activité ludique et décontractée, le jeu Evang’îles libère la parole et permet de partager avec d’autres ses découvertes, espérances ou questions profondes en toute simplicité.

    Dans le monde réformé, parler de ses convictions n’est ni habituel, ni aisé. Le contact avec l’Évangile se perd davantage à chaque génération. Ce jeu vise à stimuler l’expression des convictions – en particulier la conviction que le message de l’Évangile est pertinent pour aujourd’hui – car la conviction est un facteur avéré de développement de l’Église. Il est destiné aux conseils des lieux d’Église, aux groupes de jeunes, aux familles, en fait à tous les groupes actifs dans une Église intéressés à travailler le témoignage et l’expression simple de ses convictions.

    Si vous souhaitez vous entraîner, de manière ludique, à partager vos convictions et votre avis autour des grandes interrogations de notre société et à sortir du jargon pour dire la foi autrement, ce jeu est fait pour vous !

    Favoriser le témoignage

    Un plateau de jeu, des pions, des jetons, des dés et des cartes sont au cœur de l’action. Le joueur prend conscience de ses convictions et développe la confiance en ses capacités à les exprimer. Il s’exerce à les partager avec d’autres et à traduire le vocabulaire d’Église en français courant. L’exercice permet de donner et de recevoir du feedback. Il permet aux participants de découvrir que, bien souvent, au travers de petites phrases qui peuvent sembler banales, ils peuvent toucher leur(s) interlocuteur(s).

    Nouvelle édition (2019)

    Dès maintenant, une nouvelle édition améliorée est disponible ainsi qu’une extension pour ceux qui possèdent déjà la première édition.

    Qu’y a-t-il de nouveau dans la deuxième édition, retravaillée par le Labo Khi ? Les questions sollicitent davantage un positionnement personnel, une opinion et une conviction que des connaissances catéchétiques. Les questions ont été collectées au fil des rencontres, notamment avec des personnes n’ayant pas ou peu de lien avec la foi chrétienne ou l’Église mais curieuses et intéressées. Une nouvelle finale, sur le chemin du Royaume, propose des rencontres impliquantes qui sollicitent le joueur et l’invite à faire des choix.

    Pour les détenteurs de la première version (2016), le kit d’extension comprend une nouvelle boîte de jeu, un fascicule pour le règlement du jeu, des nouvelles cartes « Question », « Personne en situation » ainsi que six cartes « Rencontre ».

    En pratique

    • Nombre de joueurs : 8 à 12
    • Age minimal : 12 ans
    • Durée du jeu 1h30 environ

    Prix

    • Le plateau de jeu et tout le matériel sont disponibles à la vente aux prix de CHF 49.–
    • Le kit complémentaire est vendu au prix de CHF 21.–
    • L’option d’emprunter le jeu est aussi possible (en Suisse seulement)

    Commande

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